Design et créativité
Here is the translation of an article published by Andy Rutledge on his Design View blog. Although I don't view creativity and pragmatism that exclusive to each others in the practice of design, it is important to recall as often as possible that design is a process you call for when you have a problem to solve, and that solutions are not coming out of nowhere. The way you look at things has to be educated for you to be able to identify the true nature of the problem, question it, and evaluate the viability of the solutions you propose. Creativity comes in, fortunately, in the production and shaping of possible solutions, but without the knowledge anchoring them in a practical reality, they haven't got any value. In a field where graphic design, typography, ergonomics, kinematics, techniques and industrialization find themselves involved, the amount of theoretical knowledge to acquire is substantial. And I don't think this is pointed out enough. This article reveals the existing gap between creativity and this knowledge.
A big thank you to Andy Rutledge for this article, and for allowing me to publish its translation here. You can either read it in its original state, or practice your french a little.
Voici la traduction d'un article publié par Andy Rutledge sur son blog Design View. Bien que je ne partage pas complètement la dichotomie qui est décrite ici entre créativité et pragmatisme, il me semble important de rappeler dès que c'est possible que le design est un processus auquel on fait appel pour résoudre un problème, et que les solutions ne sortent pas de nulle part. On doit dans un premier temps former son regard pour bien identifier le problème, le remettre en question, et surtout pour évaluer la pertinence des réponses apportées. La créativité intervient – heureusement – dans la production et la mise en forme des solutions possibles, mais sans de solides bases qui les ancrent dans une réalité pratique, elles n'ont pas beaucoup de valeur. Dans un domaine où se mêlent graphisme, typographie, ergonomie, cinématique, technique et industrialisation, le savoir théorique à acquérir est conséquent, et je doute que ce soit assez mis en avant. L'article ci-dessous est un brillant révélateur de la différence qu'il existe entre la créativité et ce savoir. Je remercie Andy Rutlegde d'avoir eu l'idée de cet article, et de m'avoir autoriser à en publier la traduction ici.
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Il y a quelques années, j'ai publié un petit test pour à la fois engager une discussion dans notre profession, et pour que les lecteurs puissent auto-évaluer leur compréhension des fondamentaux du design. Il a été – et reste – très populaire auprès de mes lecteurs. Voici un autre questionnaire autour du design, avec cette fois une audience plus ciblée et un but plus spécifique.
Les notions de créativité et de design sont trop souvent confondues chez les designers, comme chez les non-designers. Cela me dérange, car c'est l'une des idées reçues qui permettent à des prétendants créatifs mais sans savoir-faire de se considérer comme des professionnels du design alors qu'ils ne sont rien de la sorte.
La créativité, ce n'est pas du design. La créativité n'a rien à voir avec le design. La créativité n'est contrainte par aucune loi, règle ou restriction ... ce qui est sans doutes pourquoi c'est aussi enivrant (parfois jusqu'à s'y méprendre). Le design, d'un autre côté, est entièrement basé sur les mathématiques, la psychologie, la perception humaine, et toute une série de règles strictes et de lois qui peuvent être contournées par une poignée de personnes très compétentes seulement. Ceux qui ne seraient pas en territoire connu avec ces règles, ces lois et ces sciences associées ne sont en aucun cas des designers.
Pour aider à illustrer les différences entre la créativité et le design, j'ai mis au point ce petit questionnaire qui abordent certains fondamentaux du design – et non de la créativité. Ceux qui baignent dans la créativité, et non le design, seront perdus. Ceux qui ont acquis les bases du design ne rencontreront que des notions élémentaires.
En observant le log de mes referrers au long des années, j'ai pu constater que mes articles sont régulièrement inclus dans les cours de design dans les lycées, universités et centres d'apprentissage de part le monde. Pour continuer dans ce sens, j'espère que ce test pourra être utilisé par les professeurs afin qu'ils aident leurs étudiants à comprendre et identifier la différence entre la créativité et le design. Trop d'entre eux passent leurs diplômes en ayant une idée vague de cette distinction, dans le cas où ils en aient une.
Le test
1. Dans l’exemple ci-dessous, quelle disposition apparait comme étant créée par l’homme, et laquelle apparait comme étant organique ? Pourquoi ?
2. L’orientation de cette composition est-elle horizontale ou verticale ? Pourquoi ?
3. Laquelle de ces deux compositions évoque l’inconfort visuel ? Pourquoi ?
4. Suite à votre dernière réponse, par quel autre moyen pourriez-vous évoquer l’inconfort dans une composition ou une mise en page ?
5. Compte tenu de ces deux dernières réponses, quels sont les éléments que vous prendriez en compte pour mettre en place une expérience visuelle confortable ? Pourquoi ?
6. Pourquoi l’asymétrie est-elle généralement plus conseillée que la symétrie dans une mise en page ?
7. Quels mécanismes pourraient vous aider à compenser les effets de la symétrie dans une mise en page informationnelle ?
8. Décrivez les raisons spécifiques de communication pour lesquelles vous utiliseriez des coins arrondis plutôt que des coins droits dans une mise en forme.
9. Décrivez les différences de messages portés par ces deux structures :
10. Suivant la logique de la question précédente, pourquoi utiliseriez-vous un dégradé comme texture visuelle ou une gradation dans la mise en page ?
11. Quel est le but dans l’utilisation d’une grille dans une mise en page ?
12. Puisque les relations entre les objets des deux groupes ci-dessous sont les mêmes, qu’est ce qui a changé dans la figure B ?
13. Décrivez la ou les différences de message visuel primaire porté par les figures A et B.
14. Décrivez au moins trois différentes façons de guider le regard de l’observateur dans et au travers d’une composition, en empruntant un chemin particulier. Quels mécanismes peuvent être utilisés à cette fin ?
15. Dans l’image ci-dessous, quel objet influence l’autre ?
16. Est ce que l’influence que vous percevez implique le mouvement ou est-elle de nature statique ?
17. Compte tenu de votre dernière réponse, pour quel(s) effet(s) utiliseriez-vous l’influence d’un objet graphique ou structurelle sur un autre dans une composition ?
18. Laquelle de ces deux lignes communique la vitesse ?
19. Dessinez une forme géométrique masculine, et une féminine. Qu’est ce qui distingue le genre entre ces deux formes ?
20. Comparez la figure A et la figure B. Quelles fonctions sont assurées par les éléments structuraux de la figure A ? Sont-ils nécessaires ? Pourquoi et pourquoi pas ? Existent-ils d’autres moyens d’obtenir le même effet ? Si oui, quels sont-ils ?
21. Comparez les deux mises en page ci-dessous. Laquelle possède une hierarchie de l’information claire ? Comment cela est-il accompli ? Par quels autres moyens pourrait-on obtenir le même résultat ?
22. Dans laquelle de ces compositions le logo est-il le plus grand ?
Explications
Voilà. Ce sont les bases, le plus simple. Quand bien même, il est important de noter que même la plus fructueuse des créativités ne vous sera d'aucune aide pour ce test. Vous noterez que plusieurs de ces questions ont plusieurs réponses possibles, et pourraient souvent s'articuler sous forme de dissertation. Ce format est important, car c'est la meilleure façon pour les étudiants de démontrer leur assimilation, et pour une classe d'ouvrir un dialogue vers des problématiques similaires.
Vous noterez aussi que les réponses ne sont pas fournies ici, et ce pour deux raisons spécifiques. La première est que les enseignants en design les connaissent déjà et n'en ont donc pas besoin (et cela compromettrait l'usage de cette page dans leurs cours). La deuxième est que je tiens à ce que les personnes qui se croiraient designer et pour qui ces questions restent sans réponses comprennent le manque de compétences dont ils font preuve. Dans ce cas, si les réponses étaient disponibles ici, cela atténuerait certainement le sentiment d'urgence à finir leur éducation qu'ils doivent ressentir. Mon souhait le plus sincère est qu'après avoir fait le constat de leur incompétence, ces personnes cessent de tromper leurs clients sur la qualité de service qu'ils leurs proposent et s'engagent dans une formation en design digne de ce nom pour acquérir le niveau de compréhension nécessaire à la pratique du métier qu'ils prétendent aujourd'hui avoir.
J'ai pu constater au travers des discussions que j'ai eu avec des designers que les lycées, universités et centres d'apprentissage proposent souvent des formations incomplètes, et forment donc des designers incomplets et mal préparés. Je n'ai donc aucun doute que beaucoup de designers "très éduqués" échoueront à ce test. Et si les formations sont directement responsables par cet état de fait, les étudiants en design ne le sont pas moins. La responsabilité de votre éducation n'incombe pas à votre professeur, elle vous incombe à vous uniquement.
Enfin, si vous êtes de ceux qui êtes d'accord avec le fait que le design est une profession "de créatif", vous devriez sans doutes réévaluer le rôle que vous attribuez à la créativité dans le design, ainsi que la pertinence d'associer cette étiquette à votre profession.
Si vous avez trouvé le test facile, félicitations. Dans le cas contraire, et si vous souhaitez être un designer, je vous suggère de recommencer à plancher avant de prendre en charge un projet de design.